Tout est politique, notre marketing aussi. Marketing, le mot t’effraie peut-être, ou bien tu l’associes avec ce sentiment terrifiant de devoir vendre ton âme aux GAFAM. Est-il seulement possible, d’ailleurs, d’associer “marketing” et “responsable” ? Comment intéresser, séduire, convaincre nos interlocuteurs de travailler avec nous “sans bousiller la planète, ni saouler les prospects” ? Si tu es freelance et que la quête d’une façon plus respectueuse d’échanger avec ton audience et de vendre tes compétences fait partie de tes questionnements récurrents, tu es au bon endroit.
Cet article est inspiré d’une Kapsule, ces masterclass réservées aux membres de la communauté Freelances For Good. Lors de cette session, Anaïs Baumgarten, experte en marketing digital responsable, créatrice du podcast Slow Marketing et autrice du livre Slow Marketing, a partagé sa vision d’un marketing plus aligné. 🦖🦖

Et c’est Aurore, membre de la communauté et consultante éditoriale, qui a pris la plume pour rédiger cet article et retranscrire les idées fortes. 🖋️
Pourquoi choisir la voie du marketing engagé : aligner ses choix, respecter ses prospects et gagner en efficacité
“Bullshit”, “forcer à acheter”, “croissance à tout prix”… Aïe. Cette vision du marketing te file la nausée alors que tu ambitionnes plutôt de contribuer au respect des limites planétaires. Pourtant, le marketing, tu le sais, tu en as besoin pour faire connaître ton activité, faire revenir des clients, ou promouvoir tes idées.
Heureusement, des freelances engagé·es comme Anaïs Baumgarten sont là pour nous rappeler que non, le marketing n’est pas obligatoirement délétère, et que oui, il peut s’aligner avec nos engagements.
Le marketing, pour le dire vite, s’appuie sur quatre leviers d’actions pour toucher sa clientèle cible – ce qu’on appelle dans le jargon les 4P du marketing :
- le produit (ou le service) et la façon dont il est pensé et conçu
- le prix
- les canaux de distribution, ou “place” en anglais
- et enfin, la promotion, souvent la seule facette qu’on retient du marketing.
Adopter une démarche marketing responsable, c’est donc travailler sur tous ces leviers, mais avec à cœur de construire une activité consciente, efficace et cohérente.
Quelle définition du slow marketing ?
Anaïs Baumgarten définit le Slow Marketing comme
“une approche durable, inclusive et engagée du marketing, qui donne la priorité à la création de valeur à long terme plutôt qu’aux gains à court terme.”
L’idée, c’est de faire en sorte que les actions entreprises autour de ton projet construisent de la valeur à long terme, pour toi, tes parties prenantes, et même au-delà.
Prenons l’exemple d’un livre : on peut choisir une impression locale et éco-conçue ou privilégier le low-cost à l’étranger ; fixer un prix conscient avec des tarifs solidaires ou se baser uniquement sur le ROI ; le distribuer via les librairies indépendantes ou les plateformes en ligne ; en faire la promotion sobrement sur ses propres canaux ou matraquer sa mailing list jusqu’à l’épuiser.
Tu vois l’idée : chaque choix a un impact et il est possible – et même carrément souhaitable – d’opter pour la voie qui sera la plus en phase avec tes engagements.
Faire le choix d’un marketing engagé, c’est éviter le piège de la neutralité
Si tu démarres en freelance, tu crains peut-être que pratiquer l’écriture inclusive ou afficher des valeurs écologiques ou féministes te ferme des portes ou heurte une partie de ta clientèle. C’est possible et c’est justement une bonne chose. Chercher à plaire à tout le monde, c’est risquer d’attirer des projets qui ne te correspondent pas, et affronter au quotidien une dissonance entre tes aspirations et tes actions. Anaïs Baumgarten appelle cela le “piège de la neutralité”. Or on le sait, la neutralité ne change pas le monde.
Quand on aligne son marketing avec ses engagements, les vraies conséquences sont plutôt :
- d’attirer à soi des personnes en phase avec nos valeurs ;
- de provoquer des discussions avec des clients qui peuvent être en transition, en réflexion, voire les amener à transformer leurs propres pratiques ;
- de permettre à son projet entrepreneurial et à son militantisme de se nourrir mutuellement ;
- de construire un business robuste et hyper cohérent.
Bref, un pari gagnant à tous les niveaux.
Des exemples chez quelques marques bien connues
De Leroy Merlin à Lush en passant par La Vie Foods, Murphy, Label Emmaüs ou BackMarket, des marques prennent la voie d’un marketing engagé, qui assume des prises de positions claires. Si elles sont parfois clivantes, ces campagnes créent aussi de l’espace pour de nouveaux récits : l’économie de la fonctionnalité, l’inclusion, la seconde main, etc. sont mises en avant dans un discours plutôt joyeux, positif et engageant, pour dessiner les contours d’une autre vision du monde. Ce que ces campagnes racontent, c’est bien que le marketing joue aussi un rôle pour faire bouger les lignes : alors le tien aussi !

D’accord, mais concrètement, comment s’y mettre ?
On entend bien que sur le principe, ça paraît simple, mais par où démarrer quand on est solo et souvent sous l’eau ? Anaïs Baumgarten offre trois pistes accessibles aux freelances : si tu travailles sur l’un de ces piliers, ce sera un bon premier pas sur la voie du marketing responsable.
Idée n°1 : démarrer par la sobriété éditoriale
Tu crées du contenu ? Publier moins, mais publier mieux, c’est la promesse centrale de la sobriété éditoriale. En clair, refuser les injonctions à publier pour publier, la démultiplication des canaux, et les trends vides de sens.
La sobriété éditoriale a deux vertus pour toi en tant que freelance :
1/ Elle préserve ton énergie et ta charge mentale : tu n’es pas obligé de te plier à un rythme de publication qui ne te correspond pas.
2/ Elle évite de rajouter du bruit au bruit et de contribuer à la fatigue informationnelle de ton audience.
En pratique, la sobriété éditoriale à ton échelle de freelance c’est :
- Publier uniquement quand tu as quelque chose d’intéressant à dire. Ton post apporte quelque chose à ton audience ? Il est réfléchi ? Il est sourcé ? Il va l’aider à comprendre un concept, ressentir une émotion, prendre parti dans un débat ? Alors, go, c’est ce qu’on a envie de voir en ligne ! Ton post est là uniquement parce qu’il faut bien exister sur une plateforme sous peine d’être pénalisé par l’algo ? Ne te fatigue pas pour du vide. Mieux vaut publier moins souvent, mais avec toujours quelque chose d’intéressant à dire, que de multiplier des contenus “prétextes”.
- Pratiquer la règle du 80-20 : 80 % de tes contenus apportent de la valeur gratuitement à ton audience, les 20 % restant parlent de ton offre et t’aident à vendre.
- De l’authenticité avant tout. Et attention, authenticité ne veut pas dire impudeur. L’idée c’est de partager un contenu honnête, basé sur ton expertise et ta vision du monde, pas forcément de partager un selfie tous les matins. Tu peux t’inspirer d’une rencontre, d’un cas client, d’une réflexion suite à une de tes lectures, d’une problématique récurrente chez tes clients et de la façon dont tu y apportes une réponse…
Idée n°2 : penser éthique pour ses pages de vente
Si tu as une offre ou un produit à vendre, tu passeras probablement par la case “page de vente”. Or, une bonne page de vente, c’est une page de vente éthique :
- elle est honnête : elle ne survend pas, elle est bien adaptée à son audience ;
- elle est claire : elle ne jargonne pas, elle utilise un langage clair et accessible, elle affiche un prix et des conditions de vente faciles à comprendre, etc. ;
- elle est transparente : les témoignages sont de vrais témoignages, elle répond aux questions que se pose ta clientèle.
Anaïs Baumgarten cite l’exemple de la Mutuelle Alan, dont les pages de vente sont très claires et faciles à comprendre, sur un produit pourtant complexe.
Une bonne page de vente respecte l’intelligence de tes clients. Si tu pars de ce principe, tu seras sur la bonne voie.
Idée n°3 : miser sur l’email marketing pour créer du lien durable
Troisième idée citée par Anaïs : développer sa newsletter. En plus d’être le canal le plus rentable en B2B, la newsletter c’est aussi un média qui t’appartient, et qui ne dépend pas des réseaux. Enfin, une newsletter c’est un média personnalisable, pérenne, et asynchrone, respectueux aussi du temps de ton audience, si tu respectes les bonnes pratiques suivantes :
- Segmenter sa liste. Tous tes abonnés n’ont pas les mêmes besoins ni les mêmes attentes. Envoyer le bon message aux bonnes personnes, c’est respecter leur temps et leur boîte mail.
- Nettoyer régulièrement sa liste. Retirer les adresses inactives, celles qui n’ouvrent jamais les emails. Une petite liste engagée vaut mieux qu’une grande liste fantôme.
- Privilégier la qualité au volume. Comme pour la sobriété éditoriale : mieux vaut un email par mois bien pensé et utile qu’un email par semaine pour « exister ».
Comment acquérir ses premiers abonnés ?
- Mets en avant ton formulaire d’inscription sur ton site en expliquant clairement ce qu’on va recevoir (quel contenu, à quelle fréquence).
- Parle de ta newsletter sur tes réseaux sociaux.
- Et pourquoi pas, passe des partenariats avec d’autres newsletters complémentaires à la tienne pour toucher de nouveaux publics.
En bonus, 6 outils pour travailler son marketing responsable
Pour aller plus loin au quotidien, Anaïs Baumgarten livre six outils utiles.
1/ Pour mesurer l’impact de son activité numérique
Connaître en détail l’impact de son activité numérique professionnelle, voilà un bon point de départ pour agir, et c’est ce que propose de mesurer l’outil “My Impact”, de l’Institut du numérique responsable. Entièrement gratuit, l’outil mesure l’impact de tes équipements et usages numériques et de tes déplacements professionnels.
Accéder à l’outil en ligne : My Impact”, de l’Institut du numérique responsable.
2/ Pour réduire le poids de ses fichiers
Voilà une astuce simple : avec des convertisseurs gratuits comme Freeconvert, TinyPNG ou IlovePDF, tu peux compresser la taille de tes fichiers avant de les envoyer à tes clients. Inutile, en effet, d’utiliser une version HD pour juste obtenir des validations.
3/ Pour tester le poids de ses emailings
Mail Tester est un outil qui permet de vérifier la délivrabilité des emailings. Il a aussi l’avantage de t’informer sur le poids de ton email, et donc de t’aider à le réduire au maximum (en compressant les images, par exemple).
Accéder à l’outil : Mail Tester
4/ Pour checker l’accessibilité de son site
Le marketing responsable, c’est aussi l’accessibilité pour tous de tes supports numériques. Anaïs conseille l’extension Wave : elle t’indique les problématiques techniques d’accessibilité de ton site directement depuis ton navigateur Chrome, Firefox ou Edge.
Accéder à l’outil : Wave, l’extension pour checker l’accessibilité
5/ Pour encore plus d’accessibilité de tes contenus
Si tu crées un podcast ou des vidéos et que tu souhaites les rendre accessibles à tous, tu vas avoir besoin de donner accès à une transcription écrite et de créer des sous-titres. Deux outils peuvent t’intéresser :
- Scrybecast, un outil complet autour du podcast, qui propose notamment des transcriptions de l’audio (attention, outil payant)
- Descript, pour l’éditio vidéo (outil freemium)
6/ Et pour réduire sa charge mentale
Dernier outil proposé par Anaïs, Scheduled (outil payant) permet de programmer l’ensemble de ses posts sans quitter son espace Notion. Quand tu programmes tes posts à l’avance, tu te libères en effet de la charge d’y penser. Un conseil : garde quand même un peu de place pour la spontanéité, et n’oublie pas de prendre le temps qu’il faut pour répondre aux commentaires et échanger avec ton audience : c’est aussi important que de poster pour créer un lien durable avec tes lecteurs.
Accéder à l’outil : Scheduled.so
Avec ces quelques clés, on espère t’avoir réconcilié avec l’idée que le marketing est compatible avec une posture engagée.
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